
Depuis l’aube de l’Humanité et jusqu’à la fabrication du télescope par Galilée en 1609, la planète Saturne marqua la limite de la connaissance astronomique des planètes visibles.
Saturne est le « Gardien du Seuil » fixant la limite entre la réalité du monde connu et l’incompréhensible des mystères de l’infini spatial et temporel. C’est à l’intérieur des limites de ces connaissances que l’Humanité a commencé à se structurer en s’affranchissant du chaos initial.
Saturne, Maître du signe du Capricorne, la Terre Cardinale, symbolise la nécessité de fournir l’effort indispensable pour bâtir une « charpente » intègre et solide et assumer ses responsabilités face aux exigences de la vie. Il œuvre de façon concrète au cœur des circonstances de l’existence telles qu’elles se présentent et non en relation avec le domaine du souhait. Saturne en Capricorne opposé à la Lune en Cancer, est sans complaisance, l’essence saturnienne voit les choses comme elles sont, froides et sans état d’âme. Il se met dignement face aux événements et « assure » avec responsabilité, le principe saturnien ordonne à respecter les règles établies par l’autorité désignée et faire face aux conséquences des transgressions. Saturne est le poids de l’incarnation.
Chacun est appelé à manifester « son Soleil » dans le monde de Saturne. Le processus saturnien s’inscrit dans la durée et, à travers lui, le Soleil se révèle au fil du temps. La réalisation s’effectue pas à pas avec fermeté de celui qui s’engage dans une longue entreprise. L’objectif posé, les choix et les prises de positions prennent le temps de se forger, en respectant l’honnêteté envers soi-même, prenant la mesure d’une juste appréhension de ses possibilités, de ses limites et de sa sobriété. Le pouvoir de réalisation de l’essence saturnienne réside dans la ligne de conduite qu’il a fait sienne, il s’efforce de rester fidèle à lui-même quoiqu’il arrive.
La littérature astrologique réduit la fonction de Saturne à une figure dite « maléfique », de celui qui engendre l’épreuve et qui génère avec elle son lot de souffrances, alors que le rôle de Saturne est beaucoup plus nuancé et subtil, il reste tout de même teinté d’un jugement « négatif ».
La géométrie du Septénaire Céleste – Soleil, Lune et Saturne – occupent une place remarquable et tous les 3 proposent la dimension de « ce qui Est » :
– « Ce qui est » : sur le plan intérieur, sensation physique et émotionnelle – la Lune – relié à l’expérience personnelle, intime (énergie du prénom)
– « Ce qui est » : sur le plan extérieur, circonstances dans la forme inscrites dans l’espace et le temps – Saturne – la réalité des faits (énergie du nom de famille)
– « Ce qui est » : au cœur de toutes choses – le Soleil – identité véritable en analogie avec le « sans nom »
Saturne évoque l’attitude à adopter qui nous permet d’affronter l’existence, c’est la figure paternelle d’autorité, se révélant souvent comme le « maître incontournable ».
La Sagesse saturnienne peut se définir comme suit :
Eckhart Tolle
« Quoique vous réserve le présent, acceptez-le comme si vous l’aviez choisi de manière délibéré, allez toujours dans le même sens que lui, et non à contresens. Faites-en un allié et non un ennemi, cela transformera miraculeusement votre vie ».
Saturne : ou les barreaux aux fenêtres

La réalité saturnienne acceptée n’a rien à voir avec « un enfermement ». Saturne en analogie avec le concept de la « prison terrienne » – soit ce à quoi nous ne pouvons pas échapper, le moment de notre naissance et le moment de notre mort – , est toujours présente, elle est partie prenante de la condition du mortel.
Cette expression s’exprimera différemment selon le thème :
– plaintes de la Lune sur la cruauté de la vie
– nouvelle division en rêvant de lendemains meilleurs avec Jupiter
– révolte avec Uranus, en lançant des pavés sur les murs de la prison
Saturne se positionne en « maître impartial » dans cette didactique ; il est l’instructeur, l’informateur expérimenté, il est l’obstacle qui nous arrête, il est générateur de l’attitude qui nous permet de l’affronter. Il nous conduit à nous « saturniser », à nous situer comme le père qui prend en charge sa vie. La prison de Saturne touche au cœur de l’évolution, elle est semble-t-il le moyen que la vie à inventer pour qu’on sorte de l’illusion de l’identification de ses murs (l’allégorie de la caverne de Platon). Toute situation sans issue est une clé, car elle retire au « moi » ses faux-fuyants. Il nous invite à nous tenir debout dans la vie et agir, si c’est possible et nécessaire, en respectant ce que nous sommes. L’énergie de Saturne est l’opportunité renouvelée de révéler ce que l’on est à travers les limites de la forme (la prison).
Saturne, relié au plomb – soit « travailler le plomb » en alchimie – consiste à partir de ce qui est, à découvrir que le « créateur est dans la réalité qu’il crée ».
Saturne : le Sommet de la Montagne

Saturne est le chemin à parcourir en montagne, celui que l’on est censé gravir, et arrivé au sommet, on est censé y établir « sa demeure ».
De façon universelle, le montagne est considérée comme le domaine des Dieux, et l’effort entrepris pour l’atteindre marque la volonté d’habiter leur maison et de vivre en harmonie avec eux. La montagne est un lieu de rencontre entre le ciel et la Terre et, pour l’être humain, il évoque le lieu de réalisation de soi dans l’immutabilité de la pierre, l’île ou le rocher, comme socle solide face à l’élément liquide de la mer et ses tempêtes.
D’un point de vue psychologique, la montagne se réfère à une étape nouvellement acquise pour l’individualité qui émerge de l’inconscient, en même temps elle traduit l’effort maturatif que l’on fait (Saturne) pour devenir de plus en plus conscient (le Soleil).
Saturne – le père céleste – qui est Amour, porte pour l’enfant l’archétype d’un idéal sur lequel il peut projeter son propre désir de devenir ce qu’il est lui-même. C’est le père qui donne « le nom », la légitimité, le pouvoir de nous réaliser dans le monde. C’est celui qui guide l’enfant, qui l’invite à grandir, l’encourage à se prendre en charge selon le rythme de son développement, il lui fournit le besoin d’étayer sa colonne vertébrale afin de se dresser comme un « grand ». L’enfant trouvera dans le père l’autorité qu’il respecte et un modèle de fermeté qu’il le rassure. L’accompagnement du père, qui prend en compte l’unicité, le « soleil » de l’enfant, soutenu par le message implicite « donne-toi les moyens de devenir qui tu es » est symboliquement la « Bénédiction du Père ».
Saturne soumet aussi un aspect ténébreux, le père terrible qui dévore ses enfants (Mythe de Cronos). On dévore ses enfants à chaque fois que l’on tue dans l’œuf leurs aspirations à une vie plus vraie et plus saine, plus adaptée à leur essence. On reste sourd à « l’enfant intérieur », cette attitude correspond à un Saturne qui se comporte en tyran, avec un « moi » tellement rigide qu’il ne peut s’élargir et intégrer d’autres dimensions, l’enfant divin – le Soi – ; le Soleil, ne peut être ni reconnu, ni détruit, par le père terrible.
On peut définir l’aspect destructeur du père saturnien, quand il ne reconnaît l’enfant que dans la mesure de l’allégeance à sa loi. L’enfant est alors écartelé en ce qu’il est (Soleil) et ce qu’il devrait faire pour être légitimé (Saturne).
Le piège du « moi saturnien » tient au fait de parvenir à jouir d’une excellente réputation, investir dans la légitimité aux yeux du monde avec le bénéfice d’image et de sécurité plutôt que « d’être dans la vérité par rapport à soi ».
La réalisation du « Soi » passe par la croix ; le vertical et l’horizontal convergent là où l’homme se dresse dans la conscience de ce qu’il est. La crucifixion symbolise le processus d’individuation jungien, le Soi ne peut s’incarner que dans la destinée singulière que l’on est (que l’on né).
C’est en nous hissant sur la montagne de Saturne que l’on sort de la « participation inconsciente » de la famille, du groupe, de la matrice socioculturelle. Le chemin de la vallée vers la montagne, des cimes vers la plaine, évoque la relation entre l’individu et la communauté, la dialectique entre le « Moi » et l’inconscient.
Celui qui s’identifie au chêne (Saturne) serait bien inspiré d’écouter le roseau (la Lune), cette voix discrète, qui murmure aux oreilles, sous forme de vent, l’esprit de Dieux. L’homme l’entend dans la mesure où il se rend réceptif et silencieux.
Sagesse astrologique

Les Leçons de Saturne
En harmonie avec le SOLEIL
- RENONCER à considérer la vie en fonction de la réussite et de la reconnaissance qu’elle serait censée apporter et DECOUVRIR qu’elle est le lieu où se réalise ce que l’on ne connaît pas encore.
- FAIRE FACE aux situations qui se présentent à tous les niveaux, en se référant à sa VIE INTERIEURE et construire ce qui doit l’être en se fondant sur elle.
- ASSUMER sa place et son rôle dans une société qui a ses fonctionnements et ses lois, tout en restant FIDELE A SOI-MÊME
- EVOLUER dans le sens d’une responsabilité qui ne soit plus en allégeance aux principes qui dominent dans le milieu où l’on est, mais UNE VERITABLE PRISE EN CHARGE DE CE QUE L’ON EST
En harmonie avec la LUNE
- CULTIVER une sensibilité vivante tout en se construisant – tout en devenant solide – pour affronter le monde et ses difficultés.
- ETRE OUVERT ET RECEPTIF, se laisser émouvoir, tout en restant inébranlable sur ses bases.
- NOURRIR SA VIE INTIME en assumant ses obligations et tout en œuvrant à travers les conditions que l’existence nous offre.
- DEVENIR DE PLUS PLUS MATURE et autonome tout en partageant le lien de proximité avec ceux qui nous entourent.
- ALLIER RONDEUR ET STRUCTURE, se laisser vivre et se discipliner à la fois.

Namaste
Source : Luc Bigé, Eric Bérrut et Christine Gonze Conrad
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